Les pays de Foix et du Couserans dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert
Michel Bégon décembre 2003
L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers fut la plus éclatante réussite éditoriale du 18ème siècle français, avec des milliers de souscripteurs et probablement des centaines de milliers de lecteurs. Sa publication s’échelonna de 1751 à 1778, sous la direction du philosophe Denis Diderot, du mathématicien Jean d’Alembert, qui cependant se retira précocement, et du chevalier Louis de Jaucourt. Ce fut l’œuvre phare du parti philosophique, attaquée par les Jésuites, interdite par le roi, imprimée clandestinement à l’étranger, souvent même censurée par son éditeur pusillanime, mais dont les opinions contribuèrent beaucoup à l’idéologie de la révolution française.
Or, le comté de Foix apparaît dans l’Encyclopédie comme le cas exemplaire d’un pays courageux, qui sous l’oppression royale et la tyrannie de l’Eglise sut résister et faire entendre la voix de la liberté de pensée. Il est vrai que le chevalier Louis de Jaucourt (qui signe ses articles D.J.) en rédigea un bon millier de notices, notamment toutes celles traitant du Languedoc, des pays d’Ariège ou du Couserans, et qu’il était protestant, donc averti des vexations, arrestations et condamnations accablant ses coreligionnaires. L’exécution à Toulouse des trois frères de Grenier date de 1762. Les affaires Sirven et Calas, mobilisant Voltaire, sont aussi survenues en 1762, cependant que continuaient les déportations des réformés aux galères royales. On lira ci-dessous quelques extraits des nombreuses contributions de Jaucourt, avec leurs traits révélateurs de sa verve et de sa rancœur.
Si la question religieuse y apparaît prédominante, c’est que l’Eglise catholique tenait en France l’hégémonie économique, avec la propriété d’un quart environ des terres, et maintenait la royauté sous sa dépendance morale et financière, en lui prêtant des fonds et en lui accordant chaque année le « don gratuit », une modeste fraction (0,7%) de ses rentes, que Pierre Goubert estime au total à 150 millions de livres vers la fin de l’Ancien régime. C’est d’ailleurs le refus en 1788 de ce « don gratuit », par représailles contre l’édit de tolérance de 1787, pris en faveur des protestants, qui déclenchera psychologiquement la Révolution. Tout l’effort idéologique du mouvement philosophique fut de briser la puissance économique et financière de l’Eglise, ce qu’on ressent clairement chez Jaucourt.
L’intérêt qu’il porte aux pays d’Ariège semble fonction du rôle majeur qu’ils prirent dans les conflits religieux, depuis le catharisme jusqu’à la Révolution. Par comparaison, les villes de Carcassonne et Castelnaudary, dont il ne trouve rien de piquant à écrire, n’appellent de sa part qu’une brève et pauvre mention.
Que notre auteur appartienne à la noblesse ne change rien à la chose. C’est une erreur répandue de croire que la révolution sera d’abord anti-aristocratique, alors qu’elle aura parmi ses dirigeants principaux des gens de la noblesse, mais anticléricaux : le marquis de La Fayette, le duc de Talleyrand Périgord, le comte de Mirabeau, le marquis de Condorcet, le comte Barras et … Napoléon Bonaparte. Au surplus, ce ne sont pas tant les protestants que les jansénistes, notamment l’abbé Sieyès et l’abbé Grégoire, qui porteront les coups les plus durs à l’Eglise.
Il semble que Jaucourt n’ait jamais voyagé dans les Pyrénées et utilise surtout des sources livresques. C’est pourquoi, peut-être, il ne fait guère allusion à la géographie des lieux et procède beaucoup par allusions, comme si le lecteur était déjà informé des choses. Après 250 ans, ses textes deviennent de plus en plus difficiles d’interprétation. On a donc cru opportun de les accompagner de notes qui seront signalées ci-dessous par les deux lettres N.B de « nota bene » (note bien).
Extraits de l’Encyclopédie dus à Louis de Jaucourt
Languedoc
C’est un pays d’états et en même temps la province du royaume où le clergé est le plus nombreux et le plus riche. En effet, on y compte trois archevêchés et vingt évêchés. Ce pays est généralement fertile en grains, en fruits et en excellents vins. Son histoire naturelle est très curieuse par ses eaux minérales, ses plantes, ses pétrifications, ses carrières de marbre, ses mines de turquoises et autres singularités.
Le commerce de cette province, qui consiste principalement en denrées et en manufactures de soie, de draps et de petites étoffes de laine, est un commerce considérable, mais qu’il importe de rendre plus florissant, en faisant cesser les règles arbitraires établies sous les noms de traite foraine et traite domaniale. [N.B. : il s’agit de taxes d’octroi].
Il est un autre vice intérieur en Languedoc, dont les riches gardent le secret et qui doit à la longue porter un grand préjudice à cette belle province. Les biens y ont augmenté de valeur, à mesure que les progrès du commerce, soit intérieur ou extérieur, ont haussé le prix des denrées… Les manœuvriers, fermiers, ouvriers, laboureurs, y sont dans une position moins heureuse que dans d’autres provinces qui paient davantage [d’impôts]. La raison d’un fait si extraordinaire en apparence vient de ce que le prix des journées, des corvées, n’y a point haussé proportionnellement à celui des denrées. Il n’est en beaucoup d’endroits de cette province que de dix sols, comme il y a cent ans. Les propriétaires des terres, par l’effet d’un intérêt personnel mal entendu, ne veulent pas concevoir que la consommation du peuple leur reviendrait avec bénéfice ; que d’ailleurs sans aisance il ne peut y avoir d’émulation, ni de progrès dans la culture, etc.
N.B. : si péjoratif soit-il, le diagnostic de Jaucourt est fondé. Il sera développé et précisé vers 1965 par Emmanuel Leroy-Ladurie dans ses Paysans de Languedoc. La poussée démographique butant sur l’obstacle de la propriété et de la rente foncières, notamment ecclésiastiques, puisque le clergé possède là un tiers du sol, l’excédent de main d’œuvre entraîne la dépression des salaires et enrichit les propriétaires mais paupérise les producteurs. « Après 1600, note l’historien, la victoire du catholicisme est inséparable d’une certaine remontée de la société féodale ». Bien entendu, ce blocage économique nourrit l’anticléricalisme des Encyclopédistes. Dans une large mesure, il explique l’actuel sous-développement des pays d’Ariège, dont les fils des misérables métayers choisiront l’exil à Paris ou aux Amériques.
Toulouse
Quoiqu’il n’y ait point de ville dans le royaume plus avantageusement située pour le commerce que Toulouse, il ne s’y en fait cependant presqu’aucun. Le génie des habitants les porte, quand ils sont aisés, à acquérir des charges de robe, ou à viser au capitoulat ; de là vient que Toulouse, une des plus grandes villes du royaume, est une des plus pauvres et des plus dépeuplées… Son évêché fut érigé en archevêché par le pape Jean XXII et c’est un bénéfice de 80 mille livres de rente.
Sous Raymond V, comte de Toulouse, s’éleva dans cette ville un tribunal d’inquisition, au sujet de l’hérésie des Albigeois et bientôt ce tribunal fit trembler les personnes même les plus innocentes ; le bouleversement fut si grand, qu’on fut obligé de l’abolir ; mais ce qu’il y a de singulier, c’est qu’il en reste des vestiges ; car d’un côté M. de Montchal, archevêque de Toulouse, se fit attribuer le droit d’examiner si dans l’élection des capitouls, il n’y a personne qui soit suspect d’hérésie ; et de l’autre les dominicains continuent de faire pourvoir par le roi un religieux de leur ordre de l’office d’inquisiteur de Toulouse, parce qu’il y a quelques gages attachés à cette charge…
NB : si l’on compte la livre pour plus de 200 francs (30 €), le bénéfice archi-épiscopal de Toulouse s’élevait vers 1760 à beaucoup plus de 16 millions de francs (2,5 millions €) par an. Un cardinal recevait 36 000 livres. Probablement s’agissait-il d’une liste civile, sur laquelle le prélat devait payer ses domestiques. Mais au regard d’un produit intérieur brut, qui n’était qu’une petite fraction du PIB actuel, l’importance de ces rentes annuelles apparaît considérable. Il correspond au système de la commende ecclésiastique, par lequel le roi nommait sur la charge un de ses favoris, qui ne résidait pas sur place et n’était pas le desservant réel.
N.B. : ainsi dominée par d’oisifs rentiers du sol, la ville de Toulouse restera conservatrice et dépressive jusqu’au 20ème siècle. C’est l’Etat qui la convertit à l’industrie en créant, en 1924, l’Office national interprofessionnel de l’azote (ONIA) et en y installant, pour des raisons stratégiques, la construction aéronautique.
Comté de Foix
Le comté de Foix a le Toulousain au levant, le Couserans au couchant, le comté de Cominges au nord, les Pyrénées et le Roussillon au midi. Ce comté peut se glorifier d’avoir donné le jour à Bayle. Il naquit à Carlat le 8 novembre 1647, et mourut à Rotterdam la plume à la main le 28 décembre 1706 : son dictionnaire historique est le premier ouvrage de raisonnement en ce genre, où l’on puisse apprendre à penser.
N.B. : Jaucourt fait de Pierre Bayle, philosophe et protestant, le héros positif du comté de Foix. Condamné à mort pour apostasie, au motif d’être revenu à la Réforme après une conversion au catholicisme, l’auteur des Pensées sur la Comète et du Dictionnaire historique et critique est le précurseur reconnu de l’Encyclopédie.
Au demeurant, les commentaires de l’Encyclopédie sur l’œuvre de Bayle ont été si bien dispersés dans ses 10 000 pages, par crainte des foudres ecclésiastiques, qu’ils sont quasiment introuvables.
Ariège (l ‘)
Rivière de France, qui a sa source dans les Pyrénées, passe à Foix et à Pamiers, et se jette dans la Garonne. Elle roule avec son sable des paillettes d’or.
N. B. : le département de l’Ariège n’ayant été créé qu’en 1790, l’Ariège reste pour Jaucourt une rivière. Or, il se laisse abuser par la fausse étymologie latine, rapportant ce toponyme à « l’aurum », l’or. En fait les quatre noms de l’Ariège, de l’Arget, de l’Arize et du val d’Aran semblent plutôt se rattacher à la racine vasconne « ar », qui signifie vallée. La plus ancienne mention connue est un texte de 817, qui fait état du « fluvius Ariega ».
Foix
En latin Fuxum ; petite ville de France, capitale du comté du même nom, qui fait un gouvernement particulier dans le haut Languedoc. Elle est sur l’Auziège au pié des Pyrénées, entre Pamiers et Tarascon.
N.B. : les fantaisies orthographiques suggèrent que Jaucourt n’a pu relire les épreuves d’imprimerie composées en Suisse.
Pamiers ou Pamiez
En latin moderne Apamia ; ville de France dans le haut Languedoc, au pays de Foix, avec un évêché suffragant de Toulouse, érigé en 1296. Cette ville a souvent été saccagée et ne contient guère aujourd’hui que trois mille âmes. Elle est sur l’Auriègue à trois lieux N de Foix.
N.B. : suffragant signifie subalterne.
Mazères
En latin Castrum Mazeris, petite ville de France dans le comté de Foix ; les comtes de Foix y avaient anciennement un château où ils faisaient leur résidence.
Saverdun
Ville de France dans le pays de Foix, sur l’Ariège. Elle appartenait autrefois aux comtes de Toulouse et était alors une place importante. Elle soutint pendant la guerre des Albigeois un siège contre Simon de Montfort et l’obligea de se retirer avec perte. Benoît XII, né à Saverdun, où son père était meunier, se fit religieux de Cîteaux, fut élu pape à Avignon en 1334 et mourut dans cette ville en 1342. Il suivit l’exemple de Jean XXII, en déposant par de nouvelles bulles l’empereur Louis de Bavière et en le privant de tous ses biens, meubles et immeubles. Il crut aussi devoir donner une constitution sur l’état des âmes après la mort, fait sur lequel il était à propos de ne rien statuer, puisque son prédécesseur lui-même étant assis sur sa chaire pontificale, voulut établir une opinion toute différente sur la vision béatifique ; et cette opinion aurait été reçue dans l’Eglise sans l’université de Paris qui s’y opposa formellement.
Mas d’Azil
Mansium Azilii, petite ville démantelée de France au comté de Foix, dans un beau vallon sur le torrent de la Rise, à 3 lieues de Pamiers et à 4 de S. Lizier de Conserans [N.B. : 1 lieue = 4 kilomètres]. Elle était autrefois fort peuplée, mais elle n’offre que des mazures depuis la révocation de l’édit de Nantes.
N.B. : le Mas d’Azil fut une place forte des protestants jusqu’au siège de 1625, que le maréchal de Thémines dut lever, et jusqu’à la paix d’Alès de 1629, dont le traité ordonna la destruction de ses murailles, englobant la grotte.
Mirepoix
Petite ville de France dans le haut-Languedoc, avec un évêché suffragant de Toulouse, valant dix-huit mille livres de rente et n’ayant que 145 paroisses. Cette ville est nommée dans la basse latinité Mirapicum, Mirapis castrum. C’était un lieu fort et une place d’armes du comté de Foix, au commencement du treizième siècle. Les Croisés la prirent et la donnèrent à Gui de Lévis, un de leurs principaux chefs, de sorte que Mirepoix a resté depuis lors dans cette même maison. Elle est sur le Gers, à 6 lieues NE de Foix, 16 SE de Toulouse, 172 SO de Paris.
Conserans ou Couserans
Petit pays de France en Gascogne, borné par le comté de Foix, le Comminges et la Catalogne.
Liziers S.
Sanctus Lycerius et dans les temps reculés Austria, ancienne ville de France en Guienne, capitale du Cousérans, avec un évêché suffragant d’Auch. Elle a pris le nom de S. Lizier, un de ses évêques, qui mourut en 752. Le diocèse a seulement quatre-vingt deux paroisses et vaut 18.000 livres de rente à son prélat. Ce n’est que dans le douzième siècle, que les évêques de cette ville ont quitté le nom d’évêques d’Austrie. S. Lizier est sur le Salat, à 7 lieues de Pamiers, à 20 SE d’Auch, 175 SO de Paris.
Salat (le)
Rivière de France en Languedoc. Elle a sa source au sommet des Pyrénées, dans la montagne de Salau, passage d’Espagne, court dans le comté de Conserans et se jette enfin dans la Garonne à Foure. Cette rivière, comme l’Ariège, roule quelques petites paillettes d’or, que de pauvres paysans d’autour de S. Girons, s’occupent à ramasser, mais dont ils tirent à peine de quoi vivre.
Volvestre
Petit pays de France, dans le Languedoc, au diocèse de Rieux ; ce nom pourrait bien venir de celui de la petite rivière de Vol, qui arrose une partie du diocèse de Rieux.
Rieux
En latin moderne Rivi ; ville de France, dans le haut-Languedoc, sur la petite rivière de Rise, qui se jette un peu au-dessous dans la Garonne. La rencontre de plusieurs ruisseaux, qui se joignent à cet endroit, lui a vraisemblablement donné le nom de Rieux. Elle n’a de remarquable que son évêché, érigé par le pape Jean XXII en 1317 ; il fit un évêché d’un monastère et le donna au cardinal de Rabastin, qui était auparavant évêque de Pamiers.
Cet évêché vaut aujourd’hui vingt-cinq mille livres de rente et son diocèse comprend 90 paroisses, 3 abbayes d’hommes et une de filles. Ce diocèse de Rieux comprend la partie de l’ancien pays de Volvestre, qui appartenait au comte de Toulouse. Le chapitre de l’église cathédrale de Rieux est composé de 4 dignités et de 12 canonicats. Cette ville est à 10 lieues au sud-ouest de Toulouse et à 35 au couchant de Narbonne.
C’est Rieux dans le haut-Languedoc qui est la patrie de Baron (Vincent) dominicain : ce bon moine affligé du relâchement de la morale, composa plusieurs livres pour la rétablir et entr’autres son « ethica christiana », imprimée à Paris en 1666, 2 vol. in 8°, mais cette morale ne réussit pas à la cour de Rome, malgré l’approbation du maître du sacré palais, qui fut déposé, et la congrégation de l’index condamna l’ouvrage. Je le condamnerai aussi, parce qu’il est purement scholastique. Le F. Baron mourut à Paris en 1674, âgé de 70 ans.
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Le tableau dressé par Jaucourt date évidemment de la moitié du 18ème siècle. Il est rempli des fureurs religieuses, qui déboucheront en 1789 sur l’abolition des rentes ecclésiastiques et en 1792 sur la guerre civile. Notre auteur, ayant jugé inconvenant que des villes portassent le nom d’un saint ou d’une sainte (il s’en explique dans son article « saint »), ne retient que leur nom propre et réduit la sanctification catholique à la seule lettre S. C’est pourquoi on trouve la mention de la capitale du Couserans à Liziers S. et peut être aussi pourquoi Saint-Girons a disparu corps et biens du dictionnaire raisonné. Il est vrai aussi que l’actuelle capitale du Couserans n’a pris son essor qu’avec la suppression de l’évêché de Saint Lizier et l’industrialisation du 19ème siècle.
Par censure, l’histoire de l’hérésie des Albigeois fut confiée à l’abbé Edmé-François Mallet (qui signait G), désigné par la Sorbonne et imposé aux éditeurs. Aussi bien la notice relative aux Albigeois, de sa plume, est-elle une violente condamnation théologique des Cathares, qu’il confond avec les disciples du prêcheur lyonnais Pierre Valdo, pour mieux les flétrir. En effet, les Vaudois, ou fidèles de Valdo, rallièrent la réforme de Calvin et existent toujours en Italie, alors qu’il n’y a aucune filiation du catharisme, d’ailleurs disparu dès le 14ème siècle, au protestantisme plus tardif. L’abbé Mallet s’attaque donc surtout à l’hérésie restée menaçante. Aucune mention n’apparaît sous sa plume de Montségur, mais la glorification de « l’exécution de Cabrières et Mérindol (dans le Lubéron) qui acheva de dissiper les restes de cette secte dont on ne connaît plus que le nom ». Il s’agit du massacre perpétré en 1545 contre les Vaudois, ralliés à la Réforme de Calvin, mais nullement de ceux que l’on nomme aujourd’hui les Cathares (les purs), depuis que le pasteur protestant Napoléon Peyrat des Bordes-sur-Arize les réhabilita au 19ème siècle, avec le succès qu’on sait. En exaltant la résistance du Languedoc aux croisés de Simon de Montfort, Jaucourt contredit l’abbé Mallet et préfigure le pasteur Peyrat. Etranges continuités de l’histoire !
Quant à la géographie de l’Encyclopédie, elle restait celle de l’Ancien Régime et ne connaissait encore que les bourgs du Moyen Age ou les quatre diocèses d’alors, dont trois supprimés à la Révolution. Développées seulement au 19ème siècle par l’industrie, ni Saint-Girons, ni Lavelanet ni Tarascon-sur-Ariège ne sont mentionnées. Redevables de leur essor au tourisme moderne, ni Ax-les-Thermes ni Aulus-les-Bains n’émargent à l’Encyclopédie.
Bien entendu, l’art pariétal et l’art mégalithique sont ignorés, n’ayant été découverts qu’au 19ème et même au 20ème siècles. Aucune évocation n’est faite non plus des cimes de la chaîne pyrénéenne, car les montagnes passaient encore pour des sites d’horreur et la vogue touristique de l’altitude ne devait débuter qu’à la fin du 18ème siècle, dans les Alpes. D’ailleurs, le supplément de l’Encyclopédie indique que Langres est « le point de France le plus élevé » (sic), parce que situé à l’intersection de trois bassins fluviaux.
Au demeurant Jaucourt signale clairement que ces peuples qu’il dit d’ « Occitania » ne parlent pas la langue d’oil, même s’il ne s’étend guère sur le sujet linguistique, qui est resté sensible jusqu’à nos jours. Il connaît l’originalité des Gascons, dont il note, en citant le géographe alexandrin Ptolémée, qu’ils descendent des Vascons. Il marque même la particularité de leur langue, qui est à la façon basque de confondre les lettres B et V, comme l’espagnol.
Et de citer le bon mot de l’humaniste protestant Scaliger, natif d’Agen : « Felices populis quibus bibere est vivere » [heureux peuples, pour qui boire c’est vivre].
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